Bonjour Julien, peux-tu tout d’abord nous tirer un bilan général de la saison d’ag2r-la mondiale ?
C’est un bilan mitigé. On a quand même de belles satisfactions, même si c’est clair qu’on attendait une saison un petit peu meilleure en terme de victoires ou de résultats. Après il ne faut pas non plus oublier les belles prestations de l’équipe en début de saison, et je pense notamment à la belle deuxième place obtenue par Oliver Naesen lors de Milan-San Remo, sans oublier la troisième place à Gand-Wevelgem. Je peux aussi mentionner la grande révélation Benoit Cosnefroy qui a lui réalisé une très grande saison avec à la clé de nombreuses victoires. Il faut aussi souligner le maillot à pois de Romain Bardet, qui malgré une défaillance a su rebondir et faire voir au grand public qu’il avait un bon mental, et également Geoffrey Bouchard qui a lui aussi remporté le maillot de meilleur grimpeur, mais sur la Vuelta.
Forcément, le coureur qui a alimenté toutes les discussions cette année chez vous c’est Romain Bardet, peux-tu tout d’abord nous dire comment il va, et si il a totalement récupéré de l’échec du Tour de France ?
L’échec, le mot est dur. C’est vrai qu’on partait avec des ambitions élevées sur le Tour de France, mais je ré-insiste sur ce maillot à pois, même si il l’a obtenu sur la fin et avec certains concours de circonstances, mais une fois de plus il fallait avoir un gros mental, et des jambes pas si dégueulasses que ça pour aller le chercher. Donc oui, de la frustration forcément et de la déception, mais ça s’arrête là, on sait qu’une carrière il y a des hauts et des bas et Romain a obtenu beaucoup de satisfactions sur les derniers Tour de France avec deux podiums et des victoires d’étapes notamment. Cela reste donc un fait important certes, mais qui n’a pas non plus occupé nos esprits pendant toute la saison 2019.
En tout cas il va bien, il a bien récupéré du Tour de France et il a repris l’entraînement depuis quelques semaines dans l’optique de préparer 2020, et on va travailler maintenant avec l’objectif d’être performants l’an prochain.
On sait qu’il souhaite participer au Giro dans un futur proche, mais l’édition 2020, ne semble pas forcément lui convenir pour le général, contrairement au Tour, est-ce que cela vous amène à vous dire qu’il faudrait attendre une année de plus ? Ou en est la réflexion par rapport à son programme ?
C’est clair que le parcours est une chose, après on connaît la capacité des coureurs à faire la course et à la renverser, et Carapaz en est l’illustration parfaite. Il a gagné le Giro alors qu’il n’était pas forcément le favori au départ. Après oui bien sûr, le Tour de France est taillé pour un grimpeur comme Romain mais d’autres aussi.
On est en train de travailler avec le staff, l’hiver vient juste de commencer et on est dans la projection de 2020, mais à l’heure actuelle je ne peux pas vous dire quel Grand Tour Romain Bardet va faire l’an prochain. On part en stage dans quelques jours et on va travailler dans cet axe là, et je pense qu’il y aura une annonce de faite lors de ce stage.
L’an prochain, il y aura aussi deux échéances majeures pour les grimpeurs, à savoir les JO et les mondiaux, comment intègre t-on cela au programme lorsqu’on prépare le calendrier des grimpeurs de l’équipe pour la saison prochaine ?
C’est une très bonne question puisque c’est ce que l’on fait actuellement, étudier les parcours, et la récupération pour mettre les coureurs à 100% sur ces deux objectifs là. Romain l’a d’ailleurs annoncé, que ce soit les JO à Tokyo ou les mondiaux en Suisse, ce sont deux événements très importants pour lui en 2020. On sait qu’il a déjà performé sur les courses d’un jour, que ce soit à Liège ou lors des mondiaux l’an passé. Il aime ça, il est aussi très fort sur les courses par étapes, mais il possède également cette sensibilité pour les courses d’un jour, et il peut y être performant. Donc comme je le disais, on est en train de finaliser son programme pour qu’il soit bon sur ces deux épreuves du calendrier.
Pour revenir à 2019, la grande satisfaction c’est Benoît Cosnefroy, l’attendiez-vous à ce niveau, et quel rôle aura t-il l’an prochain ?
Oui on l’attendait à ce niveau. Avec Benoît, j’avais même plaisanté en disant qu’après avoir gagné sur le circuit Europe Tour, il fallait qu’il passe à l’étage supérieur, c’est à dire au World-Tour. Et on l’a vu à Plouay et au Canada assez fort, et je pense que maintenant il doit passer la vitesse supérieure pour faire parti des meilleurs mondiaux, car nous sommes tous persuadés dans le staff d’Ag2r-La Mondiale qu’il a les qualités pour ça. Et quand je vois que la jeunesse a beaucoup brillé en 2019, j’espère qu’il suivra le même chemin pour lutter avec les meilleurs mondiaux dès 2020.
Même question pour les recrues, Andrea Vendrame et Clément Champoussin, comment comptez-vous les utiliser en 2020 ?
Ce sont deux profils différents et très intéressants. On a vu Andrea Vendrame chez Androni souvent à l’avant, et qui possède une certaine pointe de vitesse. On peut dire qu’il ressemble un peu à Samuel Dumoulin, un peu puncheur/sprinter, capable de bien passer les bosses sans être un véritable sprinter. Il peut être une belle révélation en 2020 et être présent sur le calendrier World-Tour et je pense que ce sera une bonne surprise l’an prochain.
Quant à Clément, il fait parti des meilleurs grimpeurs de sa génération et c’est intéressant d’avoir quelqu’un comme lui dans l’effectif. On va l’intégrer progressivement dans l’effectif et prendre soin de lui, car il est encore jeune. On va donc construire un programme adapté à ses qualités et ne pas le mettre à gauche à droite, et on pourrait le retrouver sur un Pays Basque, au Tour de l’Ain, ou sur les classiques ardennaises et pas de Grand Tour en principe pour lui en 2020. On a vraiment un très bon grimpeur avec lui, et je suis certain qu’au fil des saisons il va se bonifier et être parmi les meilleurs.
Un mot sur les pensionnaires de Chambéry qui ne vont pas rejoindre l’effectif, à commencer par Matteo Jorgenson, qu’est-ce qui a fait qu’il a préféré Movistar ?
C’est une très bonne question. Ça fait parti des aléas d’une équipe, nous étions intéressés par sa venue, ses qualités de rouleur étaient intéressantes. Après c’est un choix personnel de sa part de ne pas intégrer l’équipe et de plutôt choisir Movistar. On a été un peu déçu de son choix, mais ça fait partie intégrante du sport, et on lui souhaite une belle réussite dans sa future équipe. Et on ne sait jamais, peut-être que notre route se recroisera à nouveau d’ici quelques années.
Quid de Nicolas Prodhomme, auteur d’une belle saison chez les amateurs, et qui semblait assez déçu qu’on ne lui donne pas sa chance chez les pros en 2020 ?
Oui, c’est clair que Nicolas avait sa place, malheureusement nous sommes limités en terme d’effectif et nous ne pouvons pas prendre tout le monde. C’est malheureux, et je comprends qu’il soit déçu car il a montré des qualités intéressantes. Il passe partout, et c’est peut-être ça son point faible, car dans le peloton professionnel c’est important d’avoir de gros points forts, que ce soit soit rouleur, sprinter ou grimpeur. Nicolas a ces trois qualités réunies, mais comme je l’ai dit on ne pouvait pas intégrer tout le monde l’an prochain, mais la porte n’est pas fermée pour autant, c’était le message de Vincent Lavenu. On sait qu’il va évoluer dans une belle structure amateurs en 2020, le CC Villefranche/Saône qui a remporté la DN1 en 2019, et à lui de rebondir et de ne pas baisser les bras. Il est encore jeune, il n’y a pas de souci, et je pense qu’il a le caractère et les qualités physiques pour ça, et une fois de plus, la porte n’est pas définitivement fermée au sein de l’équipe Ag2r-La Mondiale
Pour finir, on sait que tu suis les jeunes talents qui évoluent en France de près, si on te parle de Jhon Alonso qui a fait des tests chez vous, comment vois-tu ce coureur ?
C’est un coureur intéressant qui est encore jeune, donc pour l’instant, ça reste au stade des discussions et on va regarder sa progression. On travaille beaucoup avec l’équipe juniors, ce qui fait que l’on a un réservoir important, et on regarde un peu ce qui se passe dans la « classe biberon ». C’est intéressant d’avoir des garçons comme ça, d’avoir un œil sur eux. On sait qu’il y a beaucoup de talent chez ce garçon, et qu’il va sûrement progresser au fil du temps pour atteindre le niveau professionnel, et il n’y a pas de souci à se faire pour son avenir.
Il se murmure qu’il a déjà signé un pré-contrat chez vous, rumeur fondée ou non ?
Non, on se signe pas de pré-contrat chez Ag2r-La Mondiale, la réglementation nous l’interdit. Ce sont simplement des discussions que nous avons avec ce garçon, et sur qui nous avons un œil très avisé, mais pour l’instant, rien de signé, ni de décidé.
Propos recueillis par Mylène Terme