Alors que la saison va toucher à sa fin le 8 novembre, la rédaction de Velo-Club anticipe et se penche déjà sur les bilans de fin de saison. L'occasion pour nous de rencontrer et d'interroger les responsables d'équipes, à commencer par Philippe Lannes, qui a pris le temps de revenir avec nous sur la saison et le recrutement de la formation Nippo Delko One Provence. Une interview qui sera complétée dans la journée par notre traditionnel bilan.
Quel sont les satisfactions de la saison 2020 ?
Tout d’abord, ce qui nous a plus, c’est que nous avons bien géré la période de confinement, puisque nous avons également signé de bonnes performances après ce dernier. On se rend compte qu’il y a des équipes qui ont mieux géré que d’autres, et que nous faisons partie de cette catégorie.
Au rayon des satisfactions, je trouve que le staff a très bien accompagné les coureurs et que la reprise a été bonne pour l’équipe. Le bloc équipe s’est également montré très intéressant, même si nous avons encore pas mal de travail à faire.
Côté sportif, nous avons eu des résultats très corrects, avec notamment un bon classement UCI, des victoires, mais aussi beaucoup de places d’honneur.
Justement, sur le plan des performances, on retient forcément Biniam Girmay, vous attendiez-vous à le voir si présent dès sa première année pro ?
Oui, on s’y attendait, c’est vraiment un très grand talent.
Comment le voyez-vous évoluer par la suite ?
Il faut faire attention avec ce type de coureur, car il est assez bon partout. Il peut bien passer les cols, il est très rapide au sprint, et il roule bien sur l’exercice chronométré. Il a beaucoup de cordes à son arc, et nous allons l’aider à se spécialiser, en travaillant sur son côté puncheur. Cela signifie que nous allons axer son calendrier sur des courses vallonnées style Laigueglia, Paris-Camembert, car nous pensons que c’est là qu’il va être le meilleur.
Même question pour Simon Carr, qui a gagné dès ses débuts chez les pros.
On a moins de données pour Simon que pour Biniam, et pour finir sur lui, pour l’instant nous lui avons demandé de ne pas s’occuper des classements généraux, car cela demande beaucoup de concentration entre autres choses. Biniam est un garçon qui a beaucoup d’explosivité et je pense sincèrement qu’il sera capable l’an prochain de gagner en World-Tour. Il est déjà très fort et il a pour moi une très grosse marge de progression.
Pour finir sur la saison écoulée, cela a été un peu plus dur j’ai l’impression pour Dusan Rajovic, qui sortait pourtant d’une belle saison avec Adria Mobil. Est-ce liée à la période d’adaptation et le verra t-on mieux selon-vous l’an prochain ?
Le souci de Dusan, c’est qu’il a été très malade pendant le confinement, où il a attrapé le Covid. On a trouvé que son début de saison chez nous était très bon, il s’était très bien adapté, même si nous n’avions pas pendant cette période, de courses vraiment adaptées à son profil de sprinter et de coureur de classiques. Il a néanmoins effectué un travail d’équipier extraordinaire, avec beaucoup de jours de course, ce qui lui a servi en terme de capacités physiques.
En fait, c’est un coureur qui était très peu préparé, et suite à la reprise et à son souci de Covid, il commençait à mieux marcher en fin de saison, et il était prêt pour Paris-Roubaix, malheureusement la course n’a pas eu lieu, mais c’est un coureur avec lequel nous n'avons aucun doute, il va marcher très fort et c’est un grand talent.
Yacob Debesay a signé pour 4 ans, qu’est-ce qui vous a donné envie de faire signer ce coureur, surtout pour une durée si longue, ce qui n’est pas très fréquent dans le monde du cyclisme ?
Lorsqu’il s’agit d’une jeune pépite que tout le monde veut, il ne viendra pas chez nous car nous ne sommes pas l’équipe la plus attractive du peloton. Néanmoins, il y a un autre type de coureurs, comme Yakob, qui ont un gros talent, et où il y a énormément de potentiel à développer. On fait donc un contrat « donnant-donnant » où on se fait confiance et on s’inscrit dans la durée.
L’idée c’est d’aller chercher des coureurs à fort potentiel comme Yabob ou comme Biniam, et de les accompagner pour les aider à se développer et se professionnaliser. Tout ça peut prendre un ou deux ans pour qu’ils arrivent à maturité, et ensuite ils vont « rendre à l’équipe » la confiance en étant hyper-performants.
Est-ce qu’on peut s’attendre à d’autres recrues d’ici la fin du mercato ?
Oui, il y en aura une mais rien n’est encore signé.
Pour passer à la suite, je voulais évoquer avec vous le Tour de France 2021, on parle déjà de la lutte entre Total Direct Energie et B&B Hôtels – Vital Concept, mais êtes-vous également candidat à une place et si oui, pensez-vous avoir une chance d’être au départ ?
Dans l’état actuel des choses, il y a une équipe automatiquement invitée, c’est à dire Alpecin – Fenix, et ensuite, il reste deux places. Arkea – Samsic et Total Direct Energie sont des institutions et cela fait de nombreuses années qu’ils sont invités. Arkea – Samsic a cette année des résultats supérieurs à nous, et Total Direct Energie, ce n’est peut-être pas le cas cette saison, mais en 2019, ils ont remporté le classement Pro Conti. Ensuite on a B&B Hôtels qui a réalisé un très bon Tour de France 2020, et le départ aura lieu en Bretagne l’an prochain.
Sincèrement, en l’état actuel des choses, je pense que l’on a peu de chances.
Est-ce que ce n’est pas un peu frustrant pour vous, car au final, lorsque l’on regarde le classement UCI, vous êtes devant TDE et B&B ?
On en parlait ce matin justement en réunion, mais au final, il y a aujourd’hui tellement d’incertitudes et de possibilités. On peut avoir un changement des règlements UCI, car on se rend compte que certains organisateurs ne sont pas satisfaits d’avoir des équipes World-Tour B ou C au départ de leur course, on peut avoir des équipes en plus ou en moins, tout ça je ne le maîtrise pas et nous n’avons pas d’infos sérieuses.
Par conséquent, on se concentre sur notre façon de travailler et essayer d’être les plus performants et les plus sérieux possibles. Mais pour le Tour de France, ce n’est qu’une question de temps, ça peut être l’année prochaine ou plus tard, mais en tout cas, ce n’est pas par la volonté d’y être que nous serons au départ, mais grâce à nos résultats et à notre travail.
Propos recueillis par Charles Marsault (photo : nippo delko one provence)