Chose assez rare, Astana-Premiertech s'apprête à débuter le Tour de France 2021 sans réelle ambition au classement général.
Son directeur performance Dmitriy Fofonov évoque les objectifs de la formation Kazakho-Canadienne sur la Grande Boucle et revient sur le dernier Giro qui s'est terminé avec une quatrième place au général pour Aleksandr Vlasov. Le coureur russe qui ne portera plus les couleurs d'Astana-Premiertech la saison prochaine.
Commençons par l'actualité chaude et ces cinq titres récoltés lors des championnats nationaux. Alors si certains étaient attendus comme en Espagne ou au Kazakhstan, la victoire de Matteo Sobrero lors de l'épreuve chronométrée en Italie est une belle surprise ?
Oui, mais on attendait un bon résultat quand même. Il a terminé quatrième du dernier contre-la-montre au Giro. Cette fois-ci, il bat Ganna et Affini. Les championnats nationaux sont toujours des courses particulières.
Il a prouvé également lors du dernier Tour de Slovénie qu'il savait grimper...
Il a le gabarit pour. Puis si il est capable de s'envoyer à bloc durant une heure sur un chrono, il peut tenir aussi à haut-régime en montée. Il ne fait pas deux mètres et quatre-vingt dix kilos (rires). C'est un coureur complet.
Vous pensez qu'il peut devenir à terme un coureur de courses par étapes ?
C'est possible et il a tout pour. Il est sorti du Giro en forme après avoir travailler pour Vlasov. Après une semaine de repos, il a été à la hauteur de ce que l'on espérait sur le Tour de Slovénie. On n'est pas surpris, on sait sur qui on a misé.
Sera t-il toujours chez Astana l'an prochain ?
Je pense, oui. On discute. Après, c'est toujours une question de prix.
Revenons au Giro et à cette quatrième place d'Aleksandr Vlasov. Quel bilan en faites-vous ?
L'équipe a bien géré, mais il y a deux passages où l'on aurait pu faire mieux. Je pense tout d'abord à l'étape où la veste de Vlasov s'est coincée dans sa roue. Il ne s'est pas arrêté au bon moment et à l'arrivée il a perdu une minute trente. Puis lors de l'étape qui a suivi la deuxième journée de repos il a eu un jour sans. Si on enlève ces deux journées difficiles, il aurait sans doute fait podium. Mais il a montré qu'il était là.
Le coureur Russe arrive en fin de contrat et a été annoncé successivement chez Ineos puis Bora. Sera t-il toujours chez Astana-Premiertech en 2022 ?
Non, mais je laisse le soin à sa future équipe d'officialiser la chose.
Vous allez donc chercher un autre leader pour le remplacer ?
Forcément, il faut regarder ce qui se présente.
On a parlé d'un éventuel retour de Vincenzo Nibali. Qu'en est-il ?
On a discuté. Il a toujours de l'affection pour l'équipe et pourrait terminer sa carrière avec nous. On en a discuté avec nos sponsors italiens.
Et à ce jour, ça en reste à de la discussion ?
Oui.
Quand allez-vous commencer à communiquer sur les prolongations de contrat ?
Alexandre Vinokourov et Yana Seel travaillent là-dessus. D'un point de vue sportif, on a envoyé la liste des coureurs qu'on voudrait conserver. Maintenant, reste à voir sur le plan financier ce qu'il est possible de faire.
Passons désormais au Tour de France qui démarre ce samedi. Pour une fois, l'équipe n'aura pas d'ambition au classement général...
Oui, on va aborder ce Tour de France d'une autre manière en étant plus libre. C'est la première fois et on verra bien ce que ça donne. C'est peut-être mieux de gagner deux ou trois étapes que de finir huitième au général. Puis les années olympiques sont toujours particulières.
À ce titre, Alexey Lutsenko a montré sur le dernier Dauphiné qu'il était en forme. Cela doit vous rassurer après un début de saison compliqué ?
On savait pourquoi le début de saison allait être compliqué. Le programme a été boulversé avec les courses espagnoles qui ont été reportées. On a fait courir du coup les leaders en priorité mais ils n'étaient pas prévus pour être en forme à ce moment-là. On a tout remis à plat lors des derniers camps d’entraînements et on est bien reparti. On a fait pas mal de podiums, les qualités sont là puisqu'on se bat pour la victoire. Maintenant il ne reste plus qu'à concrétiser plus.
Ce n'est pas trop frustrant justement de passer si près de la victoire ?
Oui, mais c'est le sport. On a une quinzaine de deuxième places, parfois ce sont cinq millimètres qui font la différence. Ça ne veut pas dire qu'on est pas bon puisqu'on est dans le coup pour la gagne. Ça va finir par se déclencher. On a déjà eu un avant-goût au Dauphiné avec Lutsenko qui a gagné un beau chrono devant Ion Izagirre.
Astana-Premiertech semble avoir progressé cette saison dans ce domaine. C'est lié à un travail spécifique, au matériel ?
On n'a jamais arrêté. Depuis l'arrêt de notre collaboration avec Specialized, on a changé notre stratégie. On travaille auprès de nos fournisseurs de vélos. On a commencé avec Argon 18 puis Willier Triestina désormais.
À côté de ça, il y a la reconnaissance du parcours, le choix du matériel. Mais il y a des haut et des bas. Certains ont progressé, d'autres comme Jakob (Fuglsang) ont plus de mal comme on l'a vu sur le Tour de Suisse. Mais on n'a jamais arrêté de travailler. Puis on a la chance d'être bien accompagné par nos fournisseurs que ce soit Limar, Willier, Sidas, Northwave. Ils sont à l'écoute et améliorent leurs produits avec nous.
Revenons au Tour de France, quel est votre favori ?
Ça va certainement se jouer entre Ineos, Jumbo et UAE. Il ne faudra pas perdre de temps au cours de la première semaine. On connait la tactique d'Ineos qui est de prendre le maillot et de gérer leur course ensuite. Ce sont eux qui ont le collectif le plus solide. J'ai hâte de voir comment Roglic va courir avec l'expérience de ce qui est arrivé l'an dernier. L'an dernier, Roglic s'est pas méfié de Pogacar et a un peu tout fait pour finir sur le podium avec lui. On sait ce qu'il est advenu à la fin. Je pense que cette année il ne lui fera pas de cadeaux.
Propos recueillis par Alexandre Paillou