Roger de Vlaeminck : Monsieur Paris-Roubaix

A quelques jours du départ de la 120ème édition de Paris-Roubaix, il nous semblait opportun de revenir sur la carrière de celui qu’on surnomme encore aujourd’hui «Monsieur Paris-Roubaix».
Né en Flandre Orientale (Belgique), et plus précisément à Eeklo le 24 août 1947, Roger De Vlaeminck reste l’une des figures marquantes du cyclisme belge du 20ème siècle.
Avec Eddy Merckx, Rik Van Looy et Jacques Anquetil, il est encore considéré aujourd’hui comme l’un des plus grands coureurs cyclistes de tous les temps. On l’aimait ou on ne l’aimait pas, mais force est de reconnaître qu’il ne laissait personne indifférent.
Il possède d’ailleurs un palmarès de très haut niveau et ce, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif. Pourtant sa tâche ne fut pas aisée car il construisit l’essentiel de son exceptionnel palmarès sous le règne de son grand rival Eddy Merckx, l’impitoyable ‘Cannibale’.
Petit rappel, pour les plus jeunes, de l’histoire du ‘Gitan’ comme certains le surnommèrent parfois.
Comme beaucoup d’enfants, sa première passion fut le football où il joua d’ailleurs comme centre-avant dans l’équipe de la ville. Néanmoins, dès sa sortie de l’école, son frère aîné, Eric de Vlaeminck (7 fois champion du monde de cyclo-cross) le persuade de faire carrière au sein du cyclisme mondial.
En 1965, dans les rangs des Juniors, il ne remporte qu’un seul succès mais dès l’année suivante, il explose littéralement en remportant 25 bouquets sur la saison.
Les frères De Vlaeminck entrèrent dans l’histoire en 1968 lorsqu’ils remportèrent, Eric chez les professionnels et Roger chez les amateurs, chacun le titre mondial de cyclo-cross. Un an plus tard, il rate de peu le doublé et passe, la semaine suivante, des labourés à la route en remportant d’emblée le circuit Het Volk et en se classant 2ème à Milan-San Remo derrière Eddy Merckx ! Unique !!
Roger De Vlaeminck aurait également pu réaliser un exploit sans précédent, et qui aurait toujours tenu au moment d’écrire ces lignes, à savoir être Champion du monde sur route et en cyclo-cross dans la catégorie Elite, qui plus est la même année. En effet, en 1975, ‘Le Gitan’ devient champion du monde de cyclo-cross à Melchnau (Suisse) et termine deuxième, derrière le Hollandais Hennie Kuiper, du championnat du monde Elite sur route à Yvoir (Belgique). Sans une petite querelle au sein de l’équipe nationale, avec Lucien Van Impe en fin de course, le titre se serait joué très certainement au sprint avec une victoire quasi certaine du Belge. Il loupait de ce fait la consécration mondiale. Sa chance était passée…
L’homme d’Eeklo remporta un nombre inimaginable de courses durant toute sa carrière mais chaque année, une seule le motivait comme jamais. Cette épreuve, surnommée ‘L’Enfer du Nord’, dans laquelle il s’imposa à 4 reprises (1972-74-75 et 77) pour 14 participations, ajouté à cela de nombreux podiums (4 fois second et une fois troisième), lui collait littéralement à la peau et ce n’est pas pour rien qu’on le surnomme encore aujourd’hui «Monsieur Paris-Roubaix». A part peut-être plus tard son compatriote Tom Boonen, aucun coureur n’a autant écrasé cette épreuve comme le fit «Le Gitan» qui durant sa période faste peut se targuer de n’avoir jamais crevé sur les infâmes pavés.
Un autre de ses exploits, qu’on oublie trop souvent, c’est de s’être imposé 6 fois consécutivement (de 1972 à 1977) dans l’épreuve italienne ‘La course des Deux Mers’, plus communément appelée Tirreno-Adriatico.
N’étant pas un grimpeur, il se défendait plus qu’honorablement dans cette discipline, surtout dans la moyenne montagne. Il remporta d’ailleurs le Tour de Suisse en 1975 devant le ‘roi’ Eddy en y remportant pas moins de 6 des 11 étapes proposées lors de cette édition. Malheureusement, à cause de cette lacune en haute montagne, il ne put jamais accrocher un podium dans un Grand Tour à son palmarès même s’il fut près d’y parvenir lors du Tour d’Italie 1975. Alors au sommet de sa forme et de son art, il domine outrageusement ce Giro en y enlevant 7 étapes mais il ne peut lutter face à de véritables grimpeurs tels que Francisco Galdos ou Fausto Bertoglio. Il doit finalement laisser filer la 3ème marche du podium au profit de l’Italien Felice Gimondi lors de l’étape reine (Alleghe-Passo del Stelvio).
Roger De Vlaeminck était avant tout un homme de ‘Classiques’ et un guerrier doté d’une redoutable pointe de vitesse. Cette aptitude lui permit de s’imposer lors de nombreux sprints massifs. Il remporta d’ailleurs 22 étapes sur le Tour d’Italie.
Friand des courses italiennes, Le Gitan ne participa que 3 fois au Tour de France (de 1969 à 1971) pour autant d’abandon. En 1970, il remporta son seul bouquet sur la ‘Grande Boucle’ lors de la 6ème étape entre Amiens et Valenciennes. Il ne remporta également qu’une seule étape sur la Vuelta.
Mais l’homme d’Eeklo détient aussi un autre record. Il est, avec Eddy Merckx et Rik Van Looy, l’un des trois seuls coureurs à avoir décroché à son palmarès les 5 «Monuments», à savoir Paris-Roubaix, Liège-Bastogne-Liège, le Tour des Flandres, Milan-SanRemo et le Tour de Lombardie.
Après 15 années au sommet de la hiérarchie mondiale en ayant porté successivement les maillots de Flandria (1969-71), Dreher (72), Brooklyn (73-77), Sanson (78), Gis (79), Boule d’Or (80), Daf (81-82), Gios (83) et Gis (84), Roger De Vlaeminck arrêtera sa carrière sur route en 1984 avec à son actif un total de 257 victoires.
Il tentera bien un ultime come-back en octobre 1986 en intégrant l’équipe de cyclo-cross de son éternel rival durant de longues années, à savoir Eddy Merckx, mais sans l’ombre d’un succès notable à la clef. Il renoncera alors, et ce définitivement cette fois, dès le début de la saison 1988.
Il restera néanmoins dans le milieu du cyclisme en devenant directeur sportif de formations telles que Hitachi (1988-89), Isoglass (90), Tonton Tapis (91), GB-MG (92), Collstrop (94-95) et Palmans (1996-2000).
Il en terminera définitivement avec le cyclisme après avoir essayé de former en vain de jeunes coureurs zimbabwéens au cyclo-cross durant 3 saisons (2005-07).
Roger perdra ensuite son frère aîné Eric le 4 décembre 2015. La famille De Vlaeminck avait déjà été auparavant durement touchée avec la perte de Geert (le fils d’Eric), à l’âge de seulement 26 ans, lors d’un cyclo-cross à Heist-op-den-Berg des suites d’un malaise cardiaque en course.
Il deviendra également papa lors d’un second mariage en appelant son fils Eddy, tout un symbole…
Article et Credit Photo de Christian Hiernaut