Inopinément libéré par Saint Pierre pour disputer la saison cycliste 2018, Maurice Garin est de retour de là où on ne revient pas… A quelques jours de sa reprise au Het Nieuwsblad, et malgré les nombreuses sollicitations, c’est à Vélo-Club qu’il a offert l’exclusivité de ses impressions et de ses ambitions.
Vélo-Club : Maurice, dans quelles dispositions vous trouvez-vous ?
Maurice Garin : Ma foi, un peu encrassé, forcément ! Mais surtout motivé à l’idée de remonter en selle.
VCN : Disputer une nouvelle saison, c’est tout de même même assez inespéré pour vous. Vous êtes-vous fixé des objectifs malgré ces circonstances particulières ?
MG : Je ne vous cache pas que ce n’est pas évident. Le premier objectif, c’est avant tout de regoûter aux joies de la victoire. J’aimerais en claquer une belle. Comme ce Valverde dont j'ai entendu parler la semaine dernière et qui a gagné dès son retour... Après, évidemment, si je pouvais récupérer mon bien sur le Tour de France, ce serait formidable… Voilà trop longtemps qu’il m’échappe.
VCN : Cela va faire 115 ans, en effet… Et quel est votre plan ?
MG : Déjà, je vais adopter la roue libre. Les gars qui l’ont essayé m’ont tous dit qu’elle offrait un confort incomparable, notamment en descente. Je vais justement récupérer ma nouvelle bicyclette chez les Cycles Labor demain, je verrai ce qu’ils me proposent. Le préposé de la boutique m’a parlé d’un système de dérailleur aussi, qui permettrait de changer de développement sans avoir à retourner la roue arrière. Je demande à voir mais le concept m’intéresse, j’ai toujours été très ouvert aux innovations.
VCN : Vous risquez d’être un peu en retard sur l’entraînement des autres coureurs, qui ne vous ont pas attendu…
MG : Certes, mais j’ai confiance, je suis d’une composition extraordinaire. Je ne tombe jamais malade, et mon médecin avait l’habitude de me dire que j’avais des jarrets d’airain.
VCN : Hormis le Tour de France, avez-vous coché d’autres courses, telles que la RideLondon-Surrey Classic, le BinckBank Tour ou le Tour du Guangxi ?
MG : Pardon ?
VCN : Ce sont des épreuves du calendrier WorldTour.
MG : …
VCN : Eh bien disons que ce sont des courses importantes…
MG : Désolé, connais pas. J’avais plutôt dans l’idée de faire le triplé dans Bordeaux-Paris ou de regagner Paris-Brest-Paris. Et je compte également revenir à la piste, notamment à ce Bol d’Or qui m’a toujours échappé.
VCN : Ces courses ne sont malheureusement plus au calendrier…
MG : La tuile ! Et pourquoi ?
VCN : Les distances de 500 ou 1.000 kilomètres ne sont plus d’usage dans le cyclisme moderne.
MG : C’est dommage, c’est pourtant là que l’on voyait qui étaient les vrais. Même derrière entraîneurs, ça ne se fait plus ?
VCN : Les courses derrière entraîneurs ont également disparu…
MG : Diantre…
VCN : Mais dites-nous plutôt, Maurice, quel est votre programme d’entraînement pour les jours à venir ?
MG : Je ne vais pas changer ce qui m’a plutôt réussi par le passé. Donc quelques sorties de 30 à 50 kilomètres puis une balade de 400 kilomètres en fin de semaine. Sitôt récupérée ma bicyclette, je vais reconstituer tout mon équipement : chemises et bas en flanelle, maillots en laine, lanterne à huile… Tout le nécessaire pour retrouver un niveau de performance optimal. Et sinon, qui sont les hommes à battre en ce moment ? J’imagine que les Trousselier, Wattelier, Huret ou Aucouturier ont disparu des radars… Sacré Hippolyte, quelles passes d’armes on a connu tous les deux sur les routes de France !
VCN : En effet, nous n’avons plus de nouvelle d’aucun d’eux depuis quelques décennies… Aujourd’hui, pour les courses par étapes, on pourrait citer Vincenzo Nibali, Nairo Quintana, Chris Froome ou Tom Dumoulin…
MG : Eh bien, à part ce Dumoulin, il n’y a plus beaucoup de Français... Et pourquoi cette précision "pour les courses à étapes" ? Ces loustics ne sont pas bons sur les classiques ?
VCN : Si, sans doute, mais pour la plupart ils n’y participent pas.
MG : Comme c’est curieux ! J’ai décidément raté beaucoup d’épisodes. Une belle classique, c’est quand même une ligne appréciable dans un palmarès… En tous cas, moi je compte participer à un maximum de courses cette année, je suis en manque de compétition et j'ai les cannes qui me démangent !
VCN : Il nous reste à vous remercier et à vous souhaiter bonne chance pour cette saison Maurice !
MG : Merci à vous ! Ça fait plaisir de voir que, même après une absence de longue durée, on n’est pas oublié. Je vous donne rendez-vous en juillet prochain, vêtu de ce maillot jaune que je n'ai pas encore eu la chance de connaître. Et j’espère bien voir sur les routes du prochain Tour quelques « ALLEZ GARIN » sur les lacets de l’Alpe d’Huez ou du Tourmalet… A bon entendeur !
Propos posthumes recueillis par David Guénel ( davidguenel)
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