Le transfert de Dylan Teuns rompt-il l'équité sportive de la lutte pour le maintien ?

Le transfert de Dylan Teuns rompt-il l'équité sportive de la lutte pour le maintien ?

Si vous ne suivez pas de manière assidue la lutte pour le maintien en World-Tour, vous vous êtes certainement demandé pourquoi la formation Israel Premiertech s'est tant empressée à faire signer le coureur belge Dylan Teuns, alors que ce dernier arrivait en fin de contrat en fin de saison. En grande difficulté sur le plan sportif et seulement 20ème au classement 2020-2022 qui déterminera les équipes qui pourront rester en première division lors des trois prochaines années, la formation israélienne a grandement besoin de points, et a donc cassé sa tirelire pour racheter une partie du contrat du coureur belge, l'un des gros scoreurs du peloton. Une stratégie risquée néanmoins, et qui pose question quant à l'équité sportive, car même si la règle autorise les mouvements entre le 1er et le 15 août chaque année, cette faille dans le système permet aux formations les plus riches de pouvoir tenter à quelques mois de la fin de la période, de sauver la face en sortant le porte-monnaie.

Une stratégie risquée et un coureur mis dehors

La première victime de ce mouvement, c'est le pauvre Guy Sagiv, qui sort de l'effectif de la formation Israel Premiertech pour laisser la place à Dylan Teuns, car on le rappelle, le nombre de coureurs par équipe est limité. Alors certes, Sagiv a certainement reçu une compensation, mais nul doute que le coureur israélien aurait aimé poursuivre l'aventure au plus haut niveau.

Côté stratégie, le mouvement est également risqué, car depuis les fameux transferts de coureurs iraniens, l'UCI a décidé que les points acquis avant de rejoindre la nouvelle équipe ne seront pas comptabilisés. Une bonne chose, censée mettre un frein aux signatures de "coureurs à points". Ensuite, autre élément à prendre en compte, les premiers points de Dylan Teuns ne compteront pas dans le total de l'équipe, puisque seuls les 10 meilleurs marqueurs voient leur score être intégré au classement. Avant d'envisager être rentable, il faudra donc que Teuns marque 119 points, soit un de plus qu'Omer Goldstein, actuellement 10ème scoreur de sa formation, soit plus ou moins l'équivalent d'un succès sur une épreuve de classe .1

Une équité sportive bafouée ?

Nul doute que si vous êtes le patron ou supporter de la Movistar, de Lotto, de Bike Exchange ou bien encore de Cofidis ou EF Education Easy Post, vous devez voir d'un très mauvais oeil cette arrivée de Dylan Teuns au sein de l'équipe Israel Premiertech, car alors que les dés sont censés être jetés depuis le début de la saison, la formation israélienne "s'offre" un joker. Et si il est difficile de la blâmer car le règlement lui permet de le faire, c'est l'argent seul qui permet d'effectuer cette manoeuvre, car Teuns étant toujours sous contrat avec la Bahrain-Victorious, il n'y a qu'un moyen de convaincre l'équipe de céder plus tôt son coureur, surtout quand ce dernier peut encore fournir de belles performances d'ici la fin de saison.

Et le risque sans réaction de l'UCI de voir ce cas se généraliser

Si l'UCI ne réagit pas dès la saison prochaine, le risque de voir ce genre de cas se répandre n'est pas minime, loin de là, et c'est l'argent et les petits arrangements entre amis qui viendront à chaque période clé, fausser la lutte pour le maintien, car je le rappelle, seule l'argent et de bonnes relations peuvent permettre à un coureur qui n'a pas de conflit ouvert avec son équipe d'aller voir ailleurs avant la fin de son contrat. Si vous avez de l'argent, vous pourrez donc recruter pendant 15 jours des coureurs bankables en fin de contrat, et ils sont légions tous les ans à être dans cette situation.

Et lorsque les plus riches, iront chercher un Teuns pour les classiques, un Carapaz pour la Vuelta, ou pourquoi pas un Merlier pour engranger lors des courses d'un jour, les autres eux, piégés par leur budget, devront encore une fois se surpasser, voir se faire dépasser dans la dernière ligne droite, grâce à l'arrivée de "tops coureurs" recrutés à prix d'or dans l'unique but de sauver sa place en World-Tour.

Par Charles Marsault

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