Le maillot blanc et violet du club cycliste portugais Bairrada semble n’être qu’un maillot anecdotique comme il y en a tant d’autres dans le monde du vélo. Peu de chances non plus que même les suiveurs assidus retiennent ses couleurs. Pourtant, en jetant un œil du côté de la péninsule Ibérique, plus particulièrement du Portugal, ou en ayant une connaissance encyclopédique du cyclisme portugais, quelques personnes se souviendront que ce fut l’équipe de João Almeida lors sa grande et dernière année chez les juniors en 2016. Alors si, dans quelques années, António Morgado débarque par la grande porte chez les professionnels, vous vous rappellerez peut-être le nom de cette équipe et les couleurs de son maillot.
À ce jour, avec le Danois Carl-Frederik Bevort, António Morgado n’est autre que le junior qui a remporté le plus de victoires cette saison. Neuf au total alors qu’il n’a commencé qu’à courir le 18 avril. Certes, le circuit portugais ou espagnol ne vaut pas celui danois dans les catégories jeunes mais le parcours du garçon montre qu’il a tout pour devenir une valeur sûre au Portugal, et même plus, dans un futur proche ou lointain.
Encore méconnu en dehors du Portugal et de l’Espagne, il ne fait pas de doute que Morgado intéressera rapidement des équipes plus huppées. Né le 28 janvier 2004 à Santarém, ses premières classes, chez les minimes et cadets, lui permettent d’alterner la route, la piste et le VTT avec réussite. Il explose au Portugal lors de sa première année chez les cadets : double champion du Portugal sur route et vainqueur de la Coupe du Portugal. Sa deuxième année dans cette catégorie est celle de la révélation. Pourtant faisant face à un calendrier bien vide, encore plus dans les catégorie jeunes, Morgado remporte toutes les courses qui se présentent devant lui. Ces deux années dans les rangs cadets lui permettent de remporter huit titres de champion du Portugal : course en ligne et contre-la-montre pour la route, poursuite par équipe, course aux points et à l’élimination pour la piste mais aussi le championnat dit « rampa », correspondant à de courts cronoescalada. Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, il s’impose aussi sur les différentes courses d’un jour ou par étapes dans son pays. Deux excursions à l’étranger lui permettent d’exporter son talent ailleurs qu’au Portugal. Une première fois dans le sud de la France : le Tour des Municipalités de Villemur, autour de Toulouse. Deux victoires d’étapes et le classement général. La deuxième fois, il découvre les routes espagnoles. Invité à participer à la Vuelta al Besaya cadets, avec l’équipe asturienne Ciudad de Oviedo, il réussit à remporter la deuxième et étape reine de la course. Perdant du temps lors du chrono par équipe qui faisait office de première étape, il échoue finalement à quelques petites secondes du vainqueur, Abel Rosado, aujourd’hui présent dans la réserve junior de AG2R Citroën.
La transition cadets-juniors étant loin d’être insurmontable, on pouvait dès lors attendre que sa première saison chez les juniors soit similaire à celles des deux années précédentes. L’année n’est pas terminée mais on peut d’ores et déjà considéré qu’elle est une réussite : Vuelta al Besaya ainsi que deux étapes, Gipuzkoa Klasika, première course UCI de sa carrière, Ruta do Albariño ou encore la Volta ao Concelho de Loulé, Morgado s’impose partout où il pose ses roues.
La saison se poursuit et il lui reste encore des échéances comme son tour national. Mais, en premier lieu, se tiendra d’ici quelques jours la Bizkaiko Itzulia, importante course par étapes au Pays basque. Même si ses adversaires n’auront peut-être pas des noms aussi brillants que ceux de son compatriote João Almeida, Remco Evenepoel, Thomas Pidcock, Carlos Rodriguez, Juan Ayuso ou Mark Donovan qui sont passés par cette course, António Morgado doit être en mesure de de rajouter son nom à un palmarès déjà bien garni.
Difficile de décrire avec exactitude son profil. Physiquement, le coureur portugais n’a pas le profil type du grimpeur alors qu’il en a les qualités. Doté d’une excellente pointe de vitesse, il sait aussi être extrêmement explosif lorsqu’il s’agit d’arrivée pour puncheurs. Enfin, Morgado est aussi une belle machine à rouler, capable d’attaquer et de distancer ses adversaires lorsque la route est plate. Impossible de prédire de quoi sera fait son futur. Grimpeur ? Puncheur ? Coureur de courses par étapes ou de classiques ? Seule certitude : si Morgado confirme encore lors de sa deuxième année chez les juniors, nul doute que le Portugal possèdera un nouveau grand talent en ses terres.
Par Thomas Fiolet (photo : bairrada cycling team)